Pralognan-la-Vanoise
"Que la montagne est belle ♩"… Les paroles de Jean Ferrat résonnent en moi à chaque fois que je reviens dans les Alpes. Une chanson nostalgique d’une époque où l’on avait des plaisirs simples : manger du fromage de chèvre et contempler la nature ; précisément ce que je viens faire à cette altitude !
C’est au début d'un automne que j’ai découvert Pralognan, blottie au pied des glaciers du parc national de la Vanoise et de sommets mythiques que le brouillard dissimulait avec mystère. Je me suis promis d’y revenir en été pour entrevoir ce qu’il y avait là-haut, mettant alors du vert sur mes souvenirs d’alpages marrons. Les premières visites d'une longue série, et la longueur de cet article est proportionnel à mon attachement pour cet endroit, conjuguant les plaisirs de la nature à une ambiance familiale !
Le village
Inscrite dans l’histoire de l’alpinisme et des sports d’hiver depuis 150 ans, aujourd'hui destination emblématique de la montagne française, Pralognan a longtemps été une terre reculée vivant seulement des alpages. "Praz lognan" signifie d’ailleurs "pré éloigné". L’architecture et la communication du village ne trompent pas : le tourisme a été développé ici avec raison, dans le respect de la nature et de ses habitants qui y vivent à l’année depuis le XIIe siècle, et c'est aussi ça qui me plaît beaucoup ici.
En pleine saison, les petits commerces et services en font une station animée. L’hiver, j’ai particulièrement apprécié que tout se fasse à pied : commerces, luge, départs de randos, etc.
Cascade de la Fraîche
Sur les hauteurs du village, la cascade de la Fraîche est une belle chute d’eau surmontée par une effrayante via ferrata. On y accède soit par le sud, près du camping Le Chamois (10 minutes pour le bas de la cascade), soit par le nord (uniquement en été), un lacet avant d’arriver au hameau des Fontanettes.
En hiver, il m'a fallu 50 minutes via les pistes de ski pour rejoindre le haut de la cascade depuis le camping. Le domaine alpin étant fermé covid oblige, j'ai pu redescendre en luge sur la piste rouge avec beaucoup de panache !
Autre hiver, autre ambiance, avec cette fois-ci une redescente par la forêt.
Mont Bochor
Certainement le meilleur panorama sur Pralognan, qu'il surplombe de 600 mètres ! Accessible à pied ou en téléphérique été comme hiver, il accueille un sentier de découverte d'1,4 km avec des panneaux explicatifs et plusieurs points de vue. A côté des pistes de ski que je n'ai pas encore eu l'occasion de tester, se tiennent la Grande Casse, l'aiguille de la Vanoise et le Moriond, épicentre des randos du secteur.
Les Prioux et la vallée de Chavière (été)
Côté sud s’enfonce dans la ravissante vallée de Chavière une tout aussi ravissante route ; au bout se trouve le hameau des Prioux, à peine quelques maisons aux toits de lauze, abritant autrefois hommes et bêtes pendant les transhumances 2 fois par an. Un royaume sylvestre où l’on entend tinter les cloches des vaches et dévaler le torrent depuis les glaciers. J’y ai passé de longs moments à happer l’instant, les pieds et les mains dans l’eau glacée, m’imprégnant des sons et des odeurs de ce théâtre de la nature...
Tantôt sur une rive du doron de Chavière tantôt sur l’autre, un sentier relie Pralognan aux Prioux. La plus belle partie demeure pour moi celle côté ouest, entre le pont en amont des Prioux et la petite centrale électrique 2 km plus bas.
Randonnée jusqu’aux Prioux et refuge du Roc de la Pêche (hiver)
En hiver, la route bitumée devient un autre chemin de randonnée, rendant possibles de nombreuses boucles via les ponts qui traversent entre les 2 rives. La plus connue (itinéraire balisé par l’office du tourisme) est de rallier le pont de Gerlon depuis Pralognan avant de revenir par La Chollière ; la plus longue est de poursuivre jusqu’au refuge du Roc de la Pêche.
La première fois, j’ai choisi une boucle intermédiaire faisant demi-tour aux Prioux (crampons légers suffisants car la neige est damée). Je suis partie directement depuis le camping Alpes Lodges où je logeais, direction le pont de la 6e BCA puis le pont de Gerlon dans la forêt, sous le Grand Marchet. 50 minutes pour cette partie.
Au-delà, l’itinéraire n’est plus balisé et situé dans une zone de haute montagne, néanmoins très fréquentée. Le paysage noir et blanc s’ouvre autour du cours d’eau. 1h de marche supplémentaire pour cette portion fabuleuse, puis retour à La Chollière.
L'année suivante, malgré des conditions peu favorables, je poursuis cette même randonnée dans la vallée de Chavière jusqu'au refuge du Roc de la Pêche. Le redoux et la pluie la semaine précédante ont entraîné d'importantes coulées d'avalanche, empêchant le passage sur la rive ouest au niveau de la centrale électrique. La partie jusqu'aux Prioux, entre montagne pelée et arbres dégarnis, est tristoune par rapport à mes souvenirs d'hiver ou d'été ; mais en m'enfonçant dans la vallée, l'impression d'incroyable immensité blanche reprend le dessus. Je fais demi-tour juste avant le refuge, face à la grosse montée / descente finale qui a raison de mon reste d'énergie ! Les raquettes sont inutiles si vous restez sur le chemin dammé côté est, utilisé par les saisonniers qui rejoignent le refuge en motoneige.
Lors d'une randonnée accompagnée avec Pierrot, j'ai été sensibilisée aux principes de bon sens et à l'utilisation de DVA / sonde / pelle en haute montagne. Quand on s'écarte des sentiers balisés comme ici dans la vallée de Chavière ou pour rejoindre le col de la Vanoise, je ne saurai que relayer à mon tour son discours sur l'importance de louer cet encombrant matériel, ce que je fais désormais, et de prêter attention aux alertes de la nature autour de soi.
Randonnée du col d’Aussois et de la pointe de l’Observatoire (été)
Départ du parking du Roc de la Pêche, au hameau des Prioux. Il faut d’abord marcher 45 minutes pour rejoindre la ferme du Ritort (vente directe de fromage et buvette), un tronçon commun à toutes les randos qui partent de ce secteur.
Passer devant le chalet et rejoindre le sentier qui s’élève en lacets ; à partir de là, ça monte sec !
On arrive sous le glacier de Rosoire, d’où s’écoule un torrent qu’il faut traverser en enlevant ses chaussures. Après ce passage, le décor devient lunaire. Je m’engage dans un gigantesque pierrier, creusé par de nombreux ruisseaux qui dévalent depuis les névés. Pas de panneaux par ici, et difficile de repérer les cairns parmi cet océan de cailloux. Comme d’autres randonneurs, je perds la trace du sentier et m’épuise à grimper en plein milieu du pierrier…
Je finis par atteindre le col d’Aussois (2 916 m.), qui dévoile de l'autre côté la vallée de la Maurienne et le lac de Plan d’Amont.
Encore un petit effort pour rallier la pointe de l’Observatoire, 3 015 m., mon tout premier 3 000 mètres !
Descente par le même chemin. D’après les panneaux et les topos que j’ai étudiés, c’est une rando qui demande en principe 5 heures. Je ne sais pas comment je me suis débrouillée, mais j’en ai mis presque 9 !
Sentier de la Corniche (hiver)
1h15 depuis le bas de la station pour rejoindre l’objectif de cette balade, qui me laissera dubitatif puisque là-haut, il n’y a … rien ! Pas de point de vue, de chapelle ou une quelconque curiosité. Peu importe, le chemin à lui seul mérite bien les efforts fournis. Une forêt de résineaux croulant sous une lourde couverture opaline, dévoilant régulièrement le village enneigé en dessous... Encore des instants magiques que m'a offerts Pralognan !
Randonnée du col de la Vanoise
Le parc national de la Vanoise, dont Pralognan est l’une des portes d’entrées, est un exceptionnel terrain de jeu pour les randonneurs. Pas moins de 107 sommets dépassent les 3 000 mètres d’altitude, formant un somptueux décor de haute montagne arpenté d'une moultitude d’itinéraires à pied…
Un matin de septembre 2016, je sors de ma tente en découvrant que les premiers flocons de neige ont recouvert les cimes pendant la nuit. Je décide quand même d’enfiler mes chaussures de rando, direction le lac des Vaches. Ce fut une balade étonnante, partagée entre la frustration de ne faire que deviner les sommets autour, et l’émotion d’évoluer dans cette étrange atmosphère. L'année suivante, aux beaux jours, je reprends la direction du lac des vaches, poursuivant cette fois-ci jusqu’au col de la Vanoise et redescendant par le cirque de l’Arcelin, un itinéraire classique mais somptueux. Quelques années plus tard, je retourne au col de la Vanoise en raquettes par - 14°, sous un soleil étincelant et une sacrée couche de poudreuse ! Voici les détails de ces parcours.
En été, se garer aux Fontanettes et suivre le GR le long des pistes de ski, jusqu’au refuge des Barmettes. En hiver, monter jusqu'aux Barmettes par les télésièges Edelweiss et Génépi avant de débuter le parcours.
On emprunte ensuite la route du sel et des fromages, un sentier empreint d’histoire et long de 27 km, qui relie la Tarentaise avec la Vanoise depuis plus de 3 000 ans. Au XVIIIe siècle, c’était un passage obligé pour les mules et muletiers, qui portaient le sel de Moûtiers et le beaufort jusqu’en Italie.
Le sentier grimpe dans le vallon de la Glière.
Puis on arrive au lac des Vaches, nappe d'eau traversée par une succession de dalles en pierre.
Le sentier devient rocailleux, contourne l’aiguille de la Vanoise, passe sous la Grande Casse (3 855 m.), près du lac Long, et enfin rejoint le col de la Vanoise (2 517 m.).
Version été : détour au vallon de la Leisse et retour par le cirque de l’Arcelin
Lors de ma sortie estivale, je décidai après le col de la Vanoise de poursuivre sur le plateau, longeant le lac rond et le lac du col de la Vanoise, en direction du refuge Entre-deux-Eaux.
Les marmottes, dodues et intrépides, se dandinent par dizaines à quelques pas de moi ! Elles s’écartent à peine, si bien que je m'assois très souvent pour les observer et prends pas mal de "retard" sur les horaires annoncées.
J'admire aussi un chamois, que ma présence n’a pas l’air de perturber le moins du monde !
Je fais demi-tour avant que le chemin ne redescende, à l’entrée du vallon de la Leisse, d’où l’on aperçoit la Grande Motte (3 653 m.).
Après être retournée au refuge du col de la Vanoise, je rejoins le lac des Assiettes, à sec en ce mois de juin.
Encore plusieurs heures de marche m’attendent. Je descends dans le cirque de l’Arcelin et passe sous la petite et la grande Aiguille. En raison des torrents qui gonflent et rendent le passage périlleux, cet itinéraire est en principe déconseillé l’après-midi, il vaut mieux donc rentrer par le Moriond, mais je me suis entêtée et ai mouillé mes chaussures...
Je retrouve ma voiture après 19 km et 10 heures de marche, largement rallongées à cause de mon incapacité à ne pas m’arrêter devant chaque marmotte. Cette boucle par le col de la Vanoise reste l’une de mes randos préférées, condensant tout ce que j'aime en montagne !
Version hiver : détour au lac des Assiettes et retour par le lac des Vaches
Je monte au-dessus du refuge du col de la Vanoise pour apercevoir le lac des Assiettes en contrebas. Il est impossible de redescendre par là en hiver et je reviens sur mes pas, empruntant cette-fois-ci la rive nord du lac des Vaches.
Randonnée du refuge des Barmettes jusqu'à Pralognan (hiver)
Depuis le refuge des Barmettes, il est en principe interdit de descendre à pied à travers le domaine skiable. Plusieurs sentiers existent pourtant, dont le GR, et ce versant m'avait été indiqué pour être peu exposé aux avalanches ; après m'être assurée auprès des remontées mécaniques que cela ne posait pas de problème hors vacances scolaires, je suis donc descendue en raquettes, alternant quelques passages sur le bord des pistes avec des traces en forêt. Une excellente sortie !
Premier tronçon entre les sapins avec une vue plongeante sur la station. Je rejoins ensuite le belvédère repéré depuis le télésiège, puis le pont du Creuset.
Second tronçon près d'une piste plate, avant de bifurquer sur un sentier en surplomb de la rivière. Très escarpée, cette partie passe au plus près des volutes de chantilly qui nappent les rochers et les orgues de glace. Retour par la cascade de la Fraîche. Beaucoup d'autres chemins dans les parages pour qui aime faire sa trace dans la forêt...
2 bonnets d'âne pour conclure cet article par un exergue moins léger. Le premier pour le respect des consignes sanitaires pendant la période covid : contrôles du pass sanitaire quasi-inexistants aux caisses, remontées mécaniques et restaurants, beaucoup de commerçants qui toussent et portent le masque sur le nez à l'intérieur... Le second pour le groupe Facebook de Pralognan qui distille beaucoup d'agressivité, les modérateurs défendant davantage le nombre d'abonnés et les habitants que la politesse et la bonne humeur, demandant à ce qu'on s'accommode d'une méchanceté omniprésente "qui n'est pas si grave"…
à table !
Roi des fromages de Savoie, le beaufort est produit dans les vallées de la Maurienne, de la Tarentaise, en Beaufortain et dans le val d’Arly. Il se décline en trois appelations : le beaufort d’hiver a une pâte claire car les vaches sont nourries au foin ; le beaufort d’été est fabriqué quand les vaches sont à la pâture ; quant au beaufort d’alpage, il est réalisé à au moins 1 500 m. d'altitude avec le lait d’un seul troupeau. En réalité, chaque fromage est unique et le temps d'affinage a toute son importance ; le seul conseil qui vaille reste donc de goûter ! Pour se ravitailler en fromages et laitages, 3 solutions : le magasin de la coopérative de Tarentaise, la fromagerie du Plan, et la chèvrerie de Chavière.
En tête des spécialités savoyardes, les diots et les pormoniers (des saucisses vertes au chou et aux poireaux) se font mijoter avec des oignons et du vin blanc, griller au barbecue, ou séchées pour l’apéro !
Si vous souhaitez manger près des pistes de ski, c'est au refuge des Barmettes qu'il faut aller ! Une super vue sur l'Aiguille de la Vanoise, une déco montagnarde avec des alcôves cosy, une carte qui régale et un service agréable, il s'agit aussi d'un spot classique pour observer les bouquetins.
Le fait qu'un restaurant soit fréquenté par les locaux est généralement gage de qualité et d'authenticité, règle qui se vérifie à La Bergerie. Aux Prioux, ce chalet d’alpage sert la raclette à la seule lumière des bougies. Une moitié de fromage fond devant le poêle à bois avant d’être raclée sur vos patates, le serveur répétant ses allers-retours tant qu’il vous reste des patates ! Et pour le dessert (ou le goûter), le pain perdu à la confiture de châtaignes est un régal.
Hébergement
Adepte du camping simple et nature, je me suis beaucoup plu au Chamois. En y retournant en hiver, j'ai été amusée de constater que ses emplacements étaient devenus des pistes de ski et son bloc sanitaire un entrepôt technique 🙂
Le camping Alpes Lodge propose, été comme hiver, la location de petits chalets en rondins. Un logement fonctionnel avec une vue merveilleuse sur le Bochor et le Grand Marchet, la voiture garée juste en-dessous, la neige sur le pas de la porte et une piscine pour les jours de mauvais temps, j’y ai passé un très agréable séjour !
Et quand on est plus nombreux, Le Petit Chalet de Pralognan, situé en haut de la piste de luge du Barioz, non loin de la cascade de la Fraîche.